"Cette nuit" de Joachim Schnerf : douce bourrade de Woody Allen dans le dos de Primo Levi

Cette nuit est le dernier roman de Joachim Schnerf publié aux éditions Zulma
Cette nuit est le dernier roman de Joachim Schnerf publié aux éditions Zulma

Deuxième livre pour Joachim Schnerf. Cette nuit, son deuxième roman cette fois publié aux éditions Zulma, est l’occasion de plonger dans le quotidien d’une famille un peu comme les autres, en pleine Pâque juive, alors que tout le monde s’apprête à s’attabler une fois encore pour définitivement enterrer l’année passé. Et si c’était ce passé-là l’invité tant attendu ? Lettres it be a découvert Cette nuit et vous en livre quelques mots.


# La bande-annonce

 

C’est l’histoire d’un vieil homme, au matin de Pessah, la Pâque juive, qui se remémore cette nuit si particulière qui a ponctué sa vie. Mais cette nuit-là est vraiment différente, car pour la première fois, la fête se fera sans son épouse, décédée il y a peu. Les souvenirs s’enchaînent, entremêlant ces nuits… nous emportant dans cette famille haute en couleur qui chaque année rejoue à huis clos et à guichet fermé une comédie drolatique dont elle a le secret – avec ses coups d’éclat et ses invités surprise, mention spéciale à la correspondante allemande ou au cousin un brin psychopathe.

 


Il y a Michelle, la cadette qui enrage au quart de tour et fait peur à tout le monde, à commencer par le très émotif Patrick, le père de ses enfants, et puis Denise, l’aînée un peu trop discrète et son mari Pinhas, bâtisseur de châteaux en Espagne et de palais au Maroc. Et bien sûr Salomon, le patriarche rescapé des camps, et son humour d’un genre très personnel qu’il qualifie volontiers de « concentrationnaire », lequel lui vaut, on s’en doute, quelques revers et pas mal d’incompréhension. 
Mais en ce matin de Pessah, à l’heure des préparatifs, Salomon, pour la première fois, est privé de sa femme, sa merveilleuse Sarah…

 

 


Un roman au charme irrésistible, drôle, émouvant – et magnifiquement enlevé.

 

# L'avis de Lettres it be

 

Se remémorer le passé, boire à la santé des absents partis hier et récemment, recevoir autour de soi les membres d’une famille qui s’étiole et devient le pastiche d’elle-même, repas après repas… C’est à tout ce cérémonial que s’intéresse Joachim Schnerf dans son second roman. L’auteur français né à Strasbourg en 1987 revient avec Cette nuit, après Mon sang à l’étude paru en 2014 aux Editions de l’Olivier. L’occasion de porter un regard sur un instant d’existence, au beau milieu d’une famille juive ashkénaze alsacienne. Aux confluents de l’Histoire et du banal, le jeune écrivain évite l’écueil du récit de vie lambda pour faire surgir quelques facettes astucieuses dans une histoire somme toute classique.

 

Joachim Schnerf
Joachim Schnerf

La langue est simple, sans grandes envolées malvenues. Mais cette apparente simplicité vient peut-être nuire à l’aspect burlesque qui pouvait être vendu à la lecture de la quatrième de couverture. Les différents caractères que l’on retrouve autour de la table ne font finalement pas l’objet d’une description acide et exhilarante comme attendu. L’ombre du passé est peut-être trop pesante et rôde en permanence dans ce récit, et le seul trait d’humour est offert aux piques et bons mots de Salomon. Peut-être un point noir sur ce livre à trouver ici.

 

 

 

 

 

C’est Woody Allen qui envoie une tende bourrade dans le dos de Primo Levi. Pour son second roman Joachim Schnerf dépeint le quotidien d’une famille judéo-alsacienne, peut-être même celle de l’auteur natif de Strasbourg. Une peinture sobre, qui met timidement en lumière les intimes contradictions de la communauté juive d’aujourd’hui à travers le personnage de Salomon, clown triste et déroutant. Au-delà de ce quotidien familial qui prend vit à l’approche de Pessah, la Pâque juive, Joachim Schnerf tente l’ironie mordante, l’humour noir qui fait pouffer à regret. Toutes ces blagues « concentrationnaires » jetées avec gourmandise par le personnage de Salomon à ses amis du « café-Shoah », tout cet humour cinglant sans retenue, tous ces différents éléments viennent ponctuer un roman bref, un bout d’existence peut-être autobiographique et globalement captivant.

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