Après avoir scruté les infimes causalités qui créent les grands drames dans son premier roman Constellation paru aux éditions Stock en 2014 et accueilli de façon très positive par la critique et les lecteurs de l’Hexagone (Prix de la Vocation et Grand prix du roman de l’Académie Français la même année), Adrien Bosc revient pour la rentrée littéraire de septembre 2018 avec Capitaine. Une nouvelle histoire de voyage, une nouvelle petite page de la grande Histoire mise en lumière à la suite d’une enquête minutieuse. Embarquez, sans attendre, sur le Capitaine Paul-Lemerle…
# La bande-annonce
Le 24 mars 1941, le Capitaine-Paul-Lemerle quitte le port de Marseille, avec à son bord les réprouvés de la France de Vichy et d’une Europe en feu, les immigrés de l’Est et républicains espagnols en exil, les juifs et apatrides, les écrivains surréalistes et artistes décadents, les savants et affairistes. Temps du roman où l’on croise le long des côtes de la Méditerranée, puis de la haute mer, jusqu’en Martinique, André Breton et Claude Lévi-Strauss dialoguant, Anna Seghers, son manuscrit et ses enfants, Victor Serge, son fils et ses révolutions, Wifredo Lam, sa peinture, et tant d’inconnus, tant de trajectoires croisées, jetés là par les aléas de l’agonie et du hasard, de l’ombre à la lumière. Ce qu’Adrien Bosc ressuscite c’est un temps d’hier qui ressemble aussi à notre aujourd’hui. Un souvenir tel qu’il brille à l’instant d’un péril.
# L'avis de Lettres it be
Fondateur des Editions du sous-sol aujourd’hui éditeur au Seuil, l’avignonnais Adrien Bosc revient dans les étagères de nos librairies sans rien oublier de ses premières amours. Dans son premier roman Constellation, voilà que notre homme décortiquait les raisons connues et imaginables qui avait pu causer le crash de l’avion Constellation au beau milieu de l’île Santa Maria, dans l’archipel des Açores, le 28 octobre 1949. A son bord, 37 passagers dont un certain Marcel Cerdan… Qu’est-ce qui peut bien séparer un voyage vers là-bas d’un voyage vers l’au-delà, c’est assurément l’une des questions marquantes posées par ce roman remarqué par la critique et salué par plusieurs prix comme dit précédemment.
Avec Capitaine, Adrien Bosc prolonge sa réflexion sur le voyage, sur tous ces détails qui à bord d’un avion ou d’un bateau nous séparent et nous éloignent d’un avenir possible. Cette fois, nous sommes le 24 mars 1941 et l’auteur embarque ses lecteurs sur le navire Capitaine Paul-Lemerle, au côté de tous ces gens qui fuient l’Europe en proie aux flammes. Mais, parce que l’Histoire ne retient que trop les grands noms, cette traversée n’est peut-être pas un voyage quelconque : à bord de ce bateau, des immigrés de l’Est et des rejetés de Vichy certes, mais aussi des écrivains surréalistes, nombre d’intellectuels et d’artistes en tous genres en quête de l’ailleurs. Toute une foule compacte qui traversera une grande partie du globe, semant lettres, souvenirs et traces écrites derrière elle, autant de matière donnée à Adrien Bosc pour permettre de faire vivre un livre.
L’enquête est pointue, le travail de recherche palpable. Comme dans son premier ouvrage, Adrien Bosc propose un travail dense autour de ces grandes femmes et ces grands hommes qui ont fait l’Histoire dans leur domaine respectif, avec, pour certains, comme seul point de convergence cette désormais fameuse traversée. Claude Lévi-Strauss, André Breton, Anna Seghers, Victor Serge… Ils s’animent et dansent au gré d’une plume assurée, dans les méandres d’un monde entier au bord de la falaise. Tous les regrets rencontrés dans Une vie meilleure de Rachel Rhys, un roman similaire paru chez Denoël il y a quelques mois, sont ici oubliés et ce récit de traversée invite autant à vivre l’Histoire que découvrir ces grands destins, assurément, dans un moment clé de leur existence. Un second roman solide, sérieux, plaisant et qui assoit Adrien Bosc parmi les auteurs à garder dans un coin de l’esprit, certainement pour sa grande propension à écrire des moments d’Histoire que seuls des traces incomplètes racontent aujourd’hui…
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Bosc (samedi, 29 septembre 2018)
Chaque soir deux pages suffisent pour m'endormir !