Le Mag sur TF1, un passage radiophonique sur France Inter ou encore Europe 1… Difficile de passer à côté de Christian Page, peut-être l’un des représentants de la rue les plus connus à travers l’Hexagone. Le voilà qui débarque maintenant en librairie avec Belleville au cœur publié chez Slatkine & Cie le 31 octobre 2018. Lettres it be est parti à la découverte de ce récit de vie, de ces souvenirs du trottoir qui malheureusement se multiplient sous nos yeux mi-clos.
Quatrième de couverture :
“Je n’étais pas du matin mais, dans la rue, j’ai pris l’habitude de me lever aux aurores. Ça m’évite de croiser les gamins qui partent à l’école. Je ne veux pas qu’ils me voient. Je ne veux pas me voir dans leurs yeux.”
Après trois hivers passés dans la rue, Christian Page, 46 ans, raconte le quotidien d’un SDF. En écrivant le roman de sa vie, il décrit la langueur des jours et le temps qui s’accélère, le regard des autres, les trucs, les clans, la violence, la pitié, les ivresses du bonheur et l’amour.
Chaque jour, en France, un SDF meurt dans la rue. Belleville au coeur est dédié à ces milliers d’anonymes, ces femmes, ces hommes qu’on a croisés sans doute, mais sans jamais les voir.
# L’avis de Lettres it be
Biographie modeste, manifeste de défense pour tous ceux, silencieux, qui subissent de plein fouet la pauvreté en France… Inclassable, le texte de Christian Page ne manque pourtant pas de retenir l’attention page après page. Nul doute que Belleville au cœur doit ouvrir la voie à des réflexions sur la pauvreté en France, sur notre pauvreté, nos Femmes et nos Hommes qui meurent année après année dans l’indifférence générale sinon l’émoi cherché des pages « Faits divers ». Mais ces faits d’hiver où le froid mord l’existence se répandent, se renforcent, se multiplient. Jusqu’à quand ? C’est la question, massive, soulevée par Christian Page dans son livre.
« Le rituel est toujours le même. Je déplie mon matelas maison sur les galets normands, matériel primitif anti-SDF des années 1990. Rien à voir avec ces belles sculptures en cerceaux métalliques conçus par les industriels inventifs des années 2000 ou ces très récents pieux aiguisés qu’on commence à voir un peu partout, bien plus coupants que les piques des grilles des Buttes-Chaumont, où l’idée me prend parfois d’aller dormir au vert. Ce ne sont que des galets coulés dans un lit de béton. Vous croyiez que c’était décoratif ? Non, c’est pour nous. »
Difficile de ne pas être heurté par ce récit du vrai mené par Christian Page. L’homme qui profite maintenant d’une tribune médiatique hautement méritée prend la défense de tous ses frères de lutte, que nous ne voyons presque plus que dans des chiffres flous et des statistiques déshumanisées. La critique littéraire envisageable sur ce site n’a en fait que peu d’intérêt dans le cas d’un livre comme Belleville au cœur : Christian Page raconte, parle, rappelle et interpelle sans aucune prétention littéraire inutile, sans aucun effet de manche qui pourrait sembler trahir sa démarche. Alors on se tait, on lit, on tente de savoir. Et ça vaut déjà beaucoup…
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