C'était l'un des thrillers les plus attendus du début d'année 2019 : Surface, le nouveau livre d'Olivier Norek publié chez Michel Lafon. Après Entre deux mondes, Norek continue d'imposer sa touche et son nom dans la liste des grands du genre. Lettres it be est allé lui poser quelques questions pour en savoir un peu plus sur ce nouveau thriller !
Bonjour et merci de prendre part à ce nouvel interview pour Lettres it be. On vous avait quitté en 2017, juste avant la sortie de Entre deux mondes. Cette fois, vous revenez en librairie avec votre 5ème livre : Surface. Quelques mots peut-être pour le présenter à ceux qui n’auraient pas encore eu la chance de le découvrir ?
Version teaser alors… Noémie Chastain va devoir enquêter sur la disparition de 3 gamins… malheureusement pour elle ils ont disparu il y a 25 ans d’un village qui est maintenant recouvert par 36 mètres d’eau… et c’est une seule des nombreuses manières de raconter ce roman !
Pour la deuxième fois après Entre deux mondes, vous abandonnez Victor Coste, votre personnage fétiche. Vous nous faîtes découvrir cette fois Noémie Chastain, policière en région parisienne, au caractère bien trempé et qui va vivre un véritable drame en pleine intervention. Comment est né ce personnage ?
Ce personnage est né de mes complexes et de mes blessures. Pourquoi a-t-on tant de mal à s’apprécier nous-mêmes ? Pourquoi sommes-nous si attentifs et prisonniers du regard de l’autre. J’ai donc inventé une policière qui va perdre une partie de son visage et de sa beauté après un coup de feu en pleine tête… Pour aimer ce personnage, il faudra dépasser le superficiel du physique, sa simple surface. J’ai aussi et surtout beaucoup pensé à une femme flic, Babeth, qui a vécu une histoire similaire qui pour moi raconte tout de ce métier de policier.
Dans la suite de votre récit, et sans dévoiler quoi que ce soit, vous embarquez vos lecteurs dans un petit coin de France, du côté de l’Aveyron. Une terre remplie de mystères, parfois très noirs. Après le 9-3, après Calais, pourquoi ce choix ? Comment s’est passé votre travail d’écriture en immersion ?
Immersion toute relative… c’est le village de mes parents… cela ressemblait presque à des vacances. C’était une promesse que je m’étais faite. Ecrire, c’est avoir une tribune. C’est une chance exceptionnelle. J’essaie donc à chaque fois de profiter de cette parole pour parler des choses qui m’importent… le sort des migrants, l’état de notre institution policière, de nos prisons… de nos villages endormis… de ces gens qui travaillent la terre pour nous nourrir et qu’on laisse crever…
Une fois encore, votre livre fait écho à la réalité, à votre vécu, au vécu de ces policiers que vous avez côtoyés et que vous côtoyez encore, à la réalité de nos villes, de nos banlieues, de notre pays. Comment faites-vous pour garder ce fragile équilibre entre fiction et réalité dans votre travail d’écriture ?
C’est simple… je ne suis pas un équilibriste… donc pas de fragile équilibre… l’enquête en elle-même est toujours en partie inventée (même si elle est toujours le mélange d’affaires existantes), le reste n’est que la vérité… c’est un contrat que j’ai passé avec le lecteur depuis mon premier roman. Que ce soit dans Code 93 ou dans Entre deux Mondes, vous pouvez réutiliser dans une conversation tout ce que vous y avez appris ! Lire pour s’évader mais aussi pour apprendre. Et sachez-le, j’en apprends toujours autant que le lecteur, nous faisons le même trajet.
Si on plonge plus en profondeur dans votre nouveau livre, on voit que vous maniez encore avec brio différents registres, passant de l’humour avec des dialogues ciselés et bien sentis à l’émotion pure, en passant par la tension palpable que vous savez créer à la perfection. Là encore, tout est question d’équilibre. Quelle est la recette Norek ?
S’il pouvait y avoir une recette comme en pâtisserie. Une larme, une goutte de sang, un gag, une course poursuite, un meurtre, une larme, une goutte de sang… Mon vrai secret, ce sont mes primo-lecteurs… j’en change régulièrement pour toujours avoir un œil neuf et ils ne mâchent pas leurs mots ! Je relis aussi beaucoup mon texte et si j’ai le frisson, alors c’est bon… sinon, je me remets au travail !
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Mention spéciale pour les dialogues que l’on retrouve dans Surface. Dire que ces dialogues seraient « du Audiard » est un qualificatif un peu facile et usé jusqu’à la corde, mais on est quand même soufflé par ce travail, par ces voix qui raisonnent directement dans nos oreilles. Depuis Code 93, avez-vous spécialement recherché à travailler vos dialogues, les échanges entre vos personnages ou est-ce que le cadre de Surface était plus propice à une langue bien pendue, imagée comme seuls savent le faire « les gens du Sud » ?
Flaubert avait un gueuloir… une pièce où il jouait ses dialogues. S’ils se disent correctement alors ils se lisent tout aussi correctement. Je fais la même chose dans mon salon, je prends la place de mes héros et je dis leurs lignes de dialogues. Je vérifie que j’ai le vocabulaire adapté à tel ou tel personnage, son phrasé, comme son humour. Les dialogues sont de l’orfèvrerie… mais aussi du C4… un mauvais mot, une mauvaise chute de blague et c’est toute la page qui est dynamitée !
C’est un rêve fou mais peut-on imaginer, qu’un jour, se croisent Victor Coste et Noémie Chastain dans vos prochains livres ?
Je vais leur demander. Mais j’ai très peur qu’ils tombent amoureux. Que diraient Hugo, le plongeur ou Léa, la légiste ? Non, mais t’es sérieux ? Briseur de ménages… déjà que j’ai du mal à construire une histoire d’amour, je ne vais pas me risquer à les mettre dans la même pièce…
D’ailleurs, déjà un petit scoop concernant le « prochain Norek » ?
Si seulement je le savais… j’hésite entre plusieurs histoires… mais le plus dur est de savoir qui en sera le héros ou l’héroïne !
Passons maintenant à des questions un peu plus légères pour en savoir plus sur Olivier Norek l’homme et Olivier Norek l’auteur :
Le livre à emporter sur une île un peu déserte ?
Journal d’un aventurier de Koh Lanta… ça me paraît sensé… (le livre existe promis !).
Film ou série ?
Série, mille fois série… l’histoire peut prendre son temps.
Le polar que vous auriez aimé écrire ?
La nuit des enfants rois… mais c’est plutôt un thriller. Alors, disons, Police de Hugo Boris.
Le livre que vous aimez en secret ?
L’histoire sans fin, de Michael Ende.
Le personnage que vous rêveriez d’être ?
Batman… sans la dépression chronique.
L’auteur avec qui vous voudriez discuter autour d’une bière ?
Stephen King… il me l’a proposé plusieurs fois mais je suis assez débordé… il doit comprendre qu’on a tous des agendas compliqués et que m’envoyer dix SMS par jour c’est agaçant.
L’auteur que vous n’auriez pas aimé être ?
Nicolas Lebel. Direct. Sans réfléchir. Tout me dégoûte chez lui. À moins que tout cela ne soit que de l’amour en fait… je m’interroge ! 😉
Vous ne devez écouter plus qu’une seule musique. Laquelle ?
Alors avant de croire que je me la joue « J'ai des goûts intellos »… écoutez la 7ème symphonie de Beethoven, second mouvement… c’est la musique qui irait le mieux avec ce qu’il se passe dans ma tête au quotidien.
Votre passion un peu honteuse ?
Les feux d’artifices. Le feu en général. Demandez à mon père le jour où il m’a trouvé à faire un feu de camp dans la réserve à pétrole de notre maison de campagne. Ou la fois où j’ai foutu le feu à des préfabriqués abandonnés. Ou la fois où j’ai cramé ma moquette pour vérifier si le parfum était vraiment inflammable. Ou la fois ou je me suis fait sauter le pouce avec un pétard. Ou la fois… j’arrête, j’entends les pompiers…
Le livre que vous offririez à un inconnu/une inconnue ?
L’Attrape-cœurs de Salinger… et aussi Les Racines du Mal de Dantec… elle a un sac avec elle, la personne inconnue ? Alors j’y ajoute Les Piliers de la Terre et La Mécanique du cœur… et Derrière la Haine… et Le meilleur des Mondes.
La première mesure du Président Norek ?
Casier judiciaire vierge pour tout emploi politique. Protection des lanceurs d’alerte. Interdiction totale des sacs plastiques. Obligation pour l’état de scolariser tout enfant autiste. Payer les agriculteurs et éleveurs à un salaire qui leur permet de vivre. Qui fait des bénéfices en France paie ses impôts en France. Mettre en place des mesures écologiques forcées. Si on nous demande poliment, ça ne marchera jamais, nous ne sommes pas faits comme ça. Une heure de lecture par jour à l’école. J’ai pas fini… mais bon… ça me prendrait la journée.
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