"La réaction" de Côme Martin-Karl : Problemos à l'extrême droite

La réaction est le nouveau roman de Côme Martin-Karl publié aux éditions Gallimard
La réaction est le nouveau roman de Côme Martin-Karl publié aux éditions Gallimard

Après Styles et Les occupations, Côme Martin-Karl est revenu récemment en librairie avec La réaction publié aux éditions Gallimard. Dans ce livre, l’auteur propose une plongée dans la vie de Matthieu Richard, citoyen et activiste d’extrême droite. Ambiance.


# La bande-annonce

 

« Le propriétaire de l’appartement s’appelait Yvon Saillac de Livès, il avait vingt-neuf ans mais la tête de quelqu’un de dix-neuf ans qui allait mourir à vingt-cinq. Il fumait, se droguait à l’occasion, vivait la nuit et se nourrissait de saucisses cocktail. Il avait des sympathies libertariennes et envisageait son logement comme une communauté politiquement incorrecte où il réunissait des gens qui partageaient son point de vue : peine de mort, État faible, dérégulation généralisée, darwinisme social, privatisation des sols, des sous-sols, de l’école, de la police, de la monnaie, de l’armée, de la santé, de l’air, du feu et de l’eau. »

 

 

Matthieu Richard, un trentenaire sans emploi, grenouille dans une France de plus en plus réac. Par dandysme, il fréquente divers milieux d’extrême droite, peuplés de marginaux bien nés et d’idéologues sous acide. En rejoignant le Renouveau réactionnaire, un groupuscule catholique intégriste, il se confrontera à ses névroses politiques et sentimentales.

 

Avec La réaction, qui nous entraîne du centre de Paris à la France des ronds-points, Côme Martin-Karl signe un roman édifiant sur notre époque.

 

# L'avis de Lettres it be

 

Le refus d’un emploi doré dans le marketing, l’intégration de groupuscules d’extrême-droite… Le contexte est très vite posé dans ce troisième roman signé Côme Martin-Karl. De fil en aiguille, la rencontre se fait entre le lecteur et Matthieu, personnage principal de cette histoire. Homosexuel discret et peu assumé, notre héros de papier grimpe les échelons d’un milieu que l’auteur dépeint avec force détails pour nous le faire détester. Très vite, il s’emmourachera de Khalid Derradji alias Enguerrand, un personnage auto-intitulé ainsi pour mieux pénétrer le milieu. Pourquoi « Enguerrand » ? Parce qu’il y a « guerre » dedans (si, si, c’est l’auteur qui le dit…). Et ce n’est que le début…

 

Côme Martin-Karl
Côme Martin-Karl

« Malgré mon intégration pleine et entière au Renouveau réactionnaire, j’avais du mal à nouer une relation avec Enguerrand. Il me résistait, c’était le couvercle d’un pot de confiture qu’on ne peut pas ouvrir même avec un torchon, même en tapant violemment le fond, même en y glissant un couteau. »

 

 

Le frère Marie-Marie comme porte-étendard de la cause royaliste, le combat permanent contre les gauchistes et les LGBT, une France purulente entre gilets jaunies et xénophobie rance, des passages hasardeux sur l’homosexualité (je vous laisse goûter le passage précédent)… Il y a eu au cinéma le Problemos d’Éric Judor, satire hilarante de l’extrême gauche tendance « zadiste » et cheveux sales. Avec La réaction, on se rêve à penser que Côme Martin-Karl ait aussi fait le pari de la drôlerie pour dépeindre un milieu de l’extrême-droite aussi caricatural et ridicule. Non pas que ce milieu soit, en vérité, exempt de tout reproche (bien au contraire !) mais les excès répétés et martelés de l’auteur pour bien faire comprendre à son lecteur que tous ces gens ne sont que peu fréquentables, hautement racistes et dégoûtants, ces excès-là transforment l’exercice littéraire en belle rigolade. En espérant que cela soit le but initial…

 

 

 

On ne sait que penser… Côme Martin-Karl est-il vraiment sérieux avec ce livre, ou n’est-ce là qu’une parodie politique hilarante par ses excès stéréotypiques ? La question mérite d’être posée lorsque l’on tourne l’ultime page de La réaction. Impossible que l’auteur parvienne à se prendre au sérieux dans une telle exacerbation des lieux communs de l’extrême droite, une critique branlante qui se rêverait avec de gros biceps idéologiques… On ne sait que penser, et on préfère se rassurer à croire que tout cela n’était qu’une farce réussie.

 


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