La biographie de Bobby Fischer, l’un des plus grands joueurs d’échecs de tous les temps si ce n’est le plus grand, c’est exactement ce que propose Frank Brady avec Fin de partie publié chez Aux forges de Vulcain. La maison d’édition qui monte et qui nous avait déjà conquis chez Lettres it be avec des romans comme Guide de survie pour le voyageur du temps amateur de Charles Yu ou encore Supernormal de Robert Mayer fait entrer cette fois à son catalogue une biographie somme toute classique mais qui pourrait bien se révéler être bien plus que cela…
# La bande-annonce
Frank Brady a rencontré Bobby Fischer quand le jeune prodige n’avait que dix ans, en 1953. Venu couvrir le championnat d’échecs de Brooklyn, il ignorait qu’il allait rencontrer le plus grand joueur d’échecs de tous les temps, l’homme qui allait révolutionner ce jeu et transformer les champions en rock stars médiatisées.
Doté de 181 points de QI, Fischer avait déjà lu, à l’âge de 13 ans, plusieurs centaines de livres d’échecs dans plus de six langues. Son odyssée allait l’emmener des bas-fonds miséreux de Brooklyn aux couvertures de Life et Time Magazine. Son plus haut fait d’armes est d’avoir battu les soviétiques aux championnats du monde de 1972, lors d’un match télévisé contre Spasky, match qui devait rester une des manifestations les plus médiatisées de l’affrontement de l’Ouest et de l’Est pendant la Guerre Froide. Après ce sommet, la folie de Fischer qui, canalisée, lui assurait de dominer sa discipline, se retourna contre lui, l’entraînant dans une chute sans fin et spectaculaire, dans laquelle pourtant de nombreux admirateurs lui conservèrent leur amitié : car Fischer était et restera, non seulement une figure à part du monde des échecs, mais aussi l’incarnation d’une folie proprement américaine.
Cette biographie, remarquablement écrite, particulièrement précise et riche de mille détails fascinants suit l’ascension et la chute de Fischer, héros pour les uns, monstre pour les autres – mais énigme pour tous… jusqu’à la publication de ce livre.
# L'avis de Lettres it be
« D’avance, veuillez m’excuser pour les occasionnelles spéculations que renferme cet ouvrage. Cependant, les motivations de Fischer demandent instamment à être comprises et, lorsqu’il s’agit de conjectures, je le signale au lecteur. Pour rendre justice à l’existence extraordinaire de Bobby, j’ai parfois recours aux techniques d’un romancier : description du décor, exaltation du détail, fragments de dialogues, exploration des états d’âme. Mais l’utilisation de ces procédés est toujours fondée sur mes recherches, mes souvenirs et ma connaissance de l’homme. »
Toute la démarche de Frank Brady est contenue dans ces quelques lignes. Fin de partie est le récit d’une vie aux mille facettes, le conte d’une existence qui dépasse le cadre d’un simple sport. Passé du statut de prodige des échecs parti de rien au rang de champion mythique, grignoté par une paranoïa grandissante, éloigné petit à petit de sa famille de gré ou de force, Bobby Fischer est un champion, dans sa grandeur et ses turpitudes. Et c’est, avec brio, ce que montre ce livre écrit avec la force d’un roman et l’exactitude d’une attentive biographie.
C’est un livre assurément difficile à classer. L’hésitation a été longue avant de ranger finalement ce livre du côté des romans sur Lettres it be. Bien que tout soit vrai, bien que le terme « biographie » soit affiché en rouge sur la couverture, cette Fin de partie a tout du roman, à en sentir son souffle page après page. Frank Brady, grand amoureux d’échecs devant l’Eternel, propose une biographie passionnée et passionnante, qui oscille entre l’hagiographie et le roman tant le ton est enlevé et la plume haletante. Que l’on découvre ou pas la figure de Bobby Fischer, que l’on connaisse ou pas le monde tortueux des échecs, on se laisse happer par ce livre. A découvrir d’urgence !
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