"Les nougats" de Paul Béhergé : illogique de l'être

Les nougats est le premier roman de Paul Béhergé publié chez Buchet-Chastel
Les nougats est le premier roman de Paul Béhergé publié chez Buchet-Chastel

Dans la cohorte des premiers romans qui feront leur apparition dans le cadre de la rentrée littéraire de septembre 2018, découvrons aujourd’hui Les nougats par Paul Béhergé publié chez Buchet-Chastel. D’une amitié tuée dans l’œuf à une extorsion intellectuelle mortifère, le jeune auteur né en 1991 construit un roman qui devrait surprendre et capter l’attention. Lettres it be a gouté à ces nougats et vous en dit un peu plus.


 

# La bande-annonce

 

 

Paul Montès est un génie maladroit, Olivier Labrousse, une brute. Paul Montès considère Olivier Labrousse comme son meilleur ami, Olivier Labrousse n’a pas d’ami. Pas d’ami, mais une raison d’être : avoir sa photo partout dans les journaux. Pour y parvenir, il a dépouillé Paul Montès de son génie – et maintenant il le fuit.

 

Après des années passées à manger des racines et à ruminer le passé, reclus au troisième étage d’une villa abandonnée, la Villa Maman, Paul se met en quête d’Olivier. Il se lance sur les routes avec la ferme intention de se réconcilier avec son « ami », armé seulement de sa naïveté, de ses réserves de nougats, de son plan d’action rédigé sur cahiers Clairefontaine – et de quelques kilogrammes d’explosifs.

 

 

Une odyssée grandiose et ridicule qui mène Paul Montès de Rambouillet à Manhattan, de sa vieille bicyclette aux A380 transatlantiques, d’une audacieuse relecture de l’amitié entre Platon et Socrate à des réflexions psychanalytiques sur la banquette arrière d’une Twingo.

 

 

# L'avis de Lettres it be

 

Dès la quatrième couverture de ce roman, on voit naître sous la plume de Paul Béhergé un énième duo de papier, non loin de figurer parmi les plus célèbres du genre : Don Quichotte et son fidèle serviteur Sancho Panza, George et Lennie de Des souris et des hommes, et tant d’autres encore. Moins littéraire mais plus philosophique cette fois, la relation Platon – Socrate s’inscrit également discrètement en toile de fond de ce roman, même si les rouages de ce rapport restent réservés aux lecteurs les plus renseignés. Autant de références, de rapports qui font de ce livre une lecture à plusieurs étages pour combler la plus grande frange de lecteurs possible, point fort. Seul centre de divergence avec tous ces couples : la répulsion a pris le pas sur l’attirance et Olivier, brute épaisse s’il en est et voleur éhonté des écrits géniaux de son compère, n’a plus comme seul but de fuir au plus vite un Paul bien décidé à retrouver son ami. Et c’est cette véritable chasse à l’homme qui servira de point de départ, et d’arrivée, à un roman qui n’est autre qu’une immense digression pour confier au lecteur tout le pourquoi du comment.

 

 


Paul Béhergé
Paul Béhergé

La fomentation d’un plan peut-être plus machiavélique qu’il n’y paraît, la question de la propriété intellectuelle terriblement mise à mal à l’heure de l’Internet galopant et du contenu partageable et appropriable à outrance, folie douce ou candeur inquiétante… Au-delà d’une histoire somme toute classique et d’un « suis-moi je te fuis » (très bien retranscrit par la couverture du roman par ailleurs) entre deux personnages plutôt bien campés, Paul Béhergé mélange et intègre à son roman autant de réflexions plus fortes les unes que les autres et nous interroge également sur la question de l’amitié par les temps qui courent (trop vite).

 

 

 

Les nougats, assurément l’un des premiers romans qui devraient retenir l’attention dans cette rentrée littéraire de septembre 2018. Surprenant, solidement construit, multipliant les digressions et les allusions à un monde où les valeurs bonnes ou mauvaises s’entrechoquent et se confondent, ce roman permet, de toute évidence, à Paul Béhergé de faire une entrée remarquée. Une entrée sans grandiloquence inutile avec un roman qui reprend les tendances de mise en forme du moment (intégration de documents annexes dans le cours du roman par exemple) mais ajoute une touche d’originalité bien sentie dans une histoire à mi-chemin entre la brillante folie d’En attendant Bojangles et tous ces grands romans où l’usurpation d’identité et de talents est faite reine. Les nougats, une gourmandise littéraire dont il serait bien regrettable de se priver.

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