Difficile de passer à côté de Sérotonine, le nouveau roman de Michel Houellebecq publié chez Flammarion. L’auteur de 63 ans revient en librairie avec un récit très vite décortiqué, analysé par des médias avides de sensations littéraires. Et avec Houellebecq, ce sont souvent les montagnes russes qui sont au rendez-vous… Lettres it be vous fait sa critique de Sérotonine, sans plus attendre !
# La bande-annonce
« Mes croyances sont limitées, mais elles sont violentes. Je crois à la possibilité du royaume restreint. Je crois à l’amour » écrivait récemment Michel Houellebecq.
Le narrateur de Sérotonine approuverait sans réserve. Son récit traverse une France qui piétine ses traditions, banalise ses villes, détruit ses campagnes au bord de la révolte. Il raconte sa vie d’ingénieur agronome, son amitié pour un aristocrate agriculteur (un inoubliable personnage de roman – son double inversé), l’échec des idéaux de leur jeunesse, l’espoir peut-être insensé de retrouver une femme perdue.
Ce roman sur les ravages d’un monde sans bonté, sans solidarité, aux mutations devenues incontrôlables, est aussi un roman sur le remords et le regret.
# L’avis de Lettres it be
D’emblée, il faut le dire : cette nouvelle histoire houellebecquienne est simple, basique. Florent-Claude Labrouste est ingénieur agronome. Il a travaillé pour Monsanto avant de rejoindre les rangs du Ministère de l’Agriculture. Il a la quarantaine, amoureusement il est paumé, il veut tout plaquer et vivre sa solitude jusqu’au bout. Du Houellebecq pur jus, un brin moins politique et imagé que ce que l’on pouvait retrouver avec Soumission. Très vite, des analogies ont été repérées dans Sérotonine, analogies entre l’auteur et son personnage : même formation, même métier. Des similitudes anecdotiques finalement tant on sait que l’œuvre de Michel Houellebecq est souvent aux prises avec sa réalité, sa propre existence. Passons.
Très vite, c’est la portée sociale de Sérotonine qui a été mise en avant : roman de la France des gilets jaunes, roman de la France qui meurt, de cette culture qui disparaît dans l’océan de la mondialisation… Attention à bien rester mesuré, malgré l’emballement possible : Sérotonine n’est pas non plus le manifeste social qu’on a pu dépeindre parfois : Houellebecq parle, éructe, décrit mais jamais ne s’engage véritablement. Une fois encore, Michel Houellebecq s’appuie sur un contexte social, économique voire géopolitique qui offre une toile de fond idéale à son livre. Comment ne pas se pencher sur un roman qui dépeindrait le quotidien de ces Français oubliés, qui souffrent et n’ont pas pris le train du monde nouveau en marche ?
Finalement, la recette ne bouge pas d’un iota : Michel Houellebecq est exactement là où on l’attend, il fait ce pour quoi il est un des auteurs les plus plébiscités en France mais aussi au-delà de nos frontières. Mélancolie, amour qui s’éteint, contre-plongée sur cette France poussiéreuse et mise au rebut… Désormais, tout le monde sait pourquoi il en vient à Houellebecq, et ce dernier ne manque pas de répondre aux attentes. Cela en poussant les curseurs toujours plus loin, pour ne pas décevoir (?) : dans Sérotonine, on assiste à un gang-bang canin, à une scène pédophile… Aberrant diront certains, marque de fabrique d’un auteur acide au possible diront d’autres. Houellebecq fait du Houellebecq.
Il y a aura, après lecture de ce livre, encore et toujours deux camps : les profonds détracteurs de Michel Houellebecq et ses adorateurs absolus. L’auteur, avec son septième roman, continue son travail de sape littéraire. Impossible d’être mitigé vis-à-vis de ses textes : on aime, ou on adore. On goûte à cette description d’une société qui s’écroule de partout ou bien on vomit ce mélange de mélancolie permanente, de libido en berne et de description sociétale plus que sombre. Et Sérotonine de perpétuer tout cela. Bientôt, du renouveau chez Houellebecq ?
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