Debout-payé
de Gauz
Raconter le quotidien des invisibles, narrer les journées de ceux que l’on ne voit plus, de ceux qui se sont fondus dans le décor, relégués au rang de meubles et de substrats décoratifs. C’est ici le pari de Gauz, rédacteur en chef d’un journal satirique ivoirien et maintenant auteur, que de raconter le quotidien des vigiles de nos plus grands magasins, et en particulier le quotidien d’Ossiri, un étudiant ivoirien devenu agent de sécurité pour gagner sa croûte. Alors, on a aimé ou pas chez Lettres it be ?
// « Grosses. Souvent, les femmes grosses commencent d’abord par essayer des habits plus petits… avant de disparaître discrètement avec la bonne taille dans les cabines d’essayage. » //
# La bande-annonce
(Quatrième de couverture) : « Debout-payé : désigne l’ensemble des métiers où il faut rester debout pour gagner sa pitance. » De son expérience de vigile au Camaïeu de Bastille et au Sephora des Champs-Elysées, Gauz a tiré un roman puissant, intelligent et satirique où il dénonce notre indifférence à l’égard des immigrés. A travers différents personnages, dont Ossiri, un étudiant ivoirien sans papiers devenu « debout-payé », il raconte l’épopée de l’immigration africaine en France et son histoire politique et coloniale. De son regard acéré, le vigile scrute avec ironie, colère et humour l’évolution de son métier et de note société. Le portrait implacable d’un consumérisme effréné.
# L’avis de Lettres it be
L’écriture. D’emblée, ce qui séduit dans ce roman c’est l’écriture. Comme le confessait l’auteur sur le plateau de « La Grande Librairie » sur France 5 il y a quelques temps maintenant, cette écriture est largement inspirée de Céline, et ça se sent, ça se voit, ça s’entend. On retrouve une musicalité des mots chère au docteur de Meudon et qui donne au roman toute sa fraîcheur.
Pour le reste, il faut bien reconnaître que « Debout-payé » est un roman agréable à lire. Au-delà de la dénonciation des dérives du consumérisme et des comportements des consommateurs d’aujourd’hui, entre monarchie du porte-monnaie et suffisance à bas coups, le roman séduit par bien d’autres points. Les touches d’humour, de sincérité (en partie dues à l’aspect autobiographique du roman) donnent à l’histoire un rythme suffisant pour aller au bout sans laisser venir l’ennui ou la lassitude. Des tournures de phrases en passant par ce jeu permanent avec les mots, le roman nous arrache de nombreux rires, comme rarement. Les différents personnages que l’on rencontre ont tous des spécificités attachantes qui nous passent à vouloir les découvrir rapidement, sans plus attendre. Là encore, grâce à l’effet d’une plume alerte et qui ne laisse jamais insensible.
De toute évidence, Gauz (de son vrai nom Patrice Gbaka-Bredé), celui qui revêt également les habits de photographe, scénariste et rédacteur en chef pour un journal satirique ivoirien bien connu, s’habille désormais de ceux de l’auteur à succès. Récompensé par le Prix des libraires Gilbert Joseph en 2014, salué du titre de meilleur premier roman français par le magazine Lire la même année, « Debout-payé » a été un petit raz-de-marée pour l’auteur en devenir né à Abidjan. Loin de verser dans un pathos peut-être trop répandu dans la littérature actuelle, « Debout-payé » est une véritable surprise qui ne déçoit jamais. Une valeur sûre !
// « Culture et surgelés
Sur les Champs-Elysées, le Virgin Megastore se trouve au-dessus du Monoprix. Le plafond des surgelés est le plancher du rayon des livres. Le filet de cabillaud surgelé d'Alaska prédécoupé Queens Ocean, juste au-dessous d'un Anna Gavalda : rencontre des fadeurs. » //
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