Encore un polar suédois … Pour certains, c’est le plaisir à chaque fois. Pour d’autres, la crainte d’une énième histoire où il va faire froid, où il va y avoir un inspecteur en doudoune, où il va y avoir une ville inquiétante qui croule sous la neige etc. Tove Alsterdal, auteure suédoise, arrive donc en librairie avec, sous le bras, son dernier livre Tango fantôme publié aux Editions du Rouergue. L’histoire démarre en Suède (tiens, tiens) pour très vite se diriger vers … l’Argentine et l’Amérique du Sud !
# La bande-annonce
Durant la nuit de Walpurgis, cette nuit de la fin avril où l'on fait brûler des feux pour dire adieu à l'hiver, une femme est tombée d'un balcon, du onzième étage. C'était Charlie, la soeur d'Helene Bergman, mais depuis des années elles ne se parlaient presque plus. Helene n'avait jamais partagé l'obsession de son aînée : découvrir ce qu'il était arrivé à leur mère, disparue en novembre 1977, quelque part en Amérique du Sud. De cette Ing-Marie si belle, il ne reste plus que quelques photographies et le souvenir de ceux qui l'ont aimée. Mais tandis que la police s'apprête à classer la mort de Charlie comme un banal suicide, Helene se dit qu'elle aurait dû révéler certaines choses. Au bout de ces omissions, elle va devoir conduire elle-même une étrange enquête. Pas sur une mort, mais sur deux. Pas seulement sur sa soeur, mais aussi sur sa mère. Pas seulement en Suède, mais aussi en Argentine.
# L’avis de Lettres it be
Des surprises, il va y en avoir plein les pages dans ce nouveau livre de Tove Alsterdal. L’auteure suédoise, aussi journaliste et rédactrice en chef pour la radio et la TV, revient donc après avoir défrayé la chronique dès 2012 avec son premier livre traduit en français, Femmes sur la plage paru chez Actes Sud. S’ensuivit Dans le silence enterré en 2015. Ce Tango fantôme profite d’un argument de poids pour séduire dans l’Hexagone alors que sa mise en vente ne fait que débuter : il a été élu meilleur roman policier suédois en 2014.
Tout commence de façon très classique : on s’apprête à fêter la Nuit de Walpurgis autour d’un bien beau bûcher, une femme est défenestrée, une enquête qui piétine, une sœur endeuillée. La routine quoi ! Sauf que petit à petit les rouages vont se mettre en place pour orienter la piste de l’enquête vers des conclusions bien moins évidentes que celles vers lesquelles se dirigent alors les enquêteurs locaux. A ce titre, première grande force du roman : le lecteur ne se place pas, comme souvent, au côté de l’enquêteur. On suit les pas d’Helene Bergman, la sœur endeuillée qui remonte le fil de la vie de cette Charlie, sa sœur décédée après être tombée du onzième étage. Sombre histoire de deal ? Peine de cœur qui vire au drame ? Non, non. Tove Alsterdal a plus d’un tour dans son sac et nous dirige tout droit vers l’Histoire argentine.
Il ne s’agit clairement pas d’un Dan Brown où les éléments de la vieille Histoire se mêlent pour aider l’intrigue à avancer. Ici, Tove Alsterdal prend le temps d’exposer une page récente de l’Histoire de l’Argentine pour servir son livre. Des sévices du général Videla aux Mères de la place de Mai, on remonte le pan de la fin du XXème siècle et tout cela offre un cadre idéal à un thriller qui tend parfois vers le roman historique. Mais le mystère et l’inquiétude planent au-dessus de nos têtes, de sorte à laisser une sombre (mais agréable) sensation d’incertitude tout au long de la lecture.
Allez, c’est un poil long, disons-le quand même. Il faut presque 500 pages à l’intrigue pour s’étendre et se déployer, mais le voyage vaut le coup. Ce dernier roman de Tove Alsterdal, petit pavé s’il en est, n’en demeure pas moins original sur le fond. La forme reste classique, le ton inquiétant comme il faut, mais la toile de fond qui est offerte change complètement du cadre général des polars suédois. On navigue dans l’Histoire d’Amérique Latine et ce supposé suicide par défenestration s’explique doucement d’une manière parfaitement attendue. Chez Lettres it be, on a été séduit. Mais allez-vous tenter le voyage ?
Écrire commentaire