"La Belle Époque" de Nicolas Bedos : souvenirs, souvenirs

La Belle Époque est le deuxième film de Nicolas Bedos avec Daniel Auteuil, Doria Tillier, Fanny Ardant, Guillaume Canet
La Belle Époque est le deuxième film de Nicolas Bedos avec Daniel Auteuil, Doria Tillier, Fanny Ardant, Guillaume Canet

Après Monsieur et Madame Adelman, l’heure du retour derrière la caméra de Nicolas Bedos a sonné. Il revient avec La Belle Époque et offre à Daniel Auteuil l’occasion de retourner dans les années 70. Lettres it be l’a vu et vous en ramène quelques souvenirs.

 

 

# La quatrième de couverture

 

 

 

Victor, un sexagénaire désabusé, voit sa vie bouleversée le jour où Antoine, un brillant entrepreneur, lui propose une attraction d’un genre nouveau : mélangeant artifices théâtraux et reconstitution historique, cette entreprise propose à ses clients de replonger dans l’époque de leur choix. Victor choisit alors de revivre la semaine la plus marquante de sa vie : celle où, 40 ans plus tôt, il rencontra le grand amour...


# L’avis de Lettres it be

 

 

 

Dans son premier film sorti en 2017, Nicolas Bedos avait déjà la question du passé qui disparaît et des souvenirs chevillée au corps. Le voilà qui remet le couvert dans La Belle Époque en invitant cette fois le spectateur à découvrir une entreprise un peu originale qui, moyennant finance, plonge ses clients dans l’époque de leur choix. À la tête de cette entreprise, Antoine (Guillaume Canet) est un metteur en scène hargneux et possessif, maître du moindre détail pour satisfaire sa clientèle. Salons royaliste et littéraire, bureau d’Hitler, Première Guerre mondiale et… années 70 sont au menu. Souvenirs à construire, souvenirs à détruire, souvenirs à récupérer. Souvenirs, souvenirs…

 

Victor joué par Daniel Auteuil
Victor joué par Daniel Auteuil

Victor, personnage central joué par l’inusable Daniel Auteuil, est l’incarnation du désormais célèbre « C’était mieux avant ». Dessinateur sur la pente descendante, il regarde de loin son mariage avec Marianne battre de l’aile. Les assistants vocaux, les voitures électriques, les smartphones… L’époque a perdu Victor en route, et laissé ses souvenirs sur le bas-côté. C’est sans compter sur la proposition qui va lui être faite d’aller, justement, récupérer tous ces souvenirs perdus. Et Margot d’entrer dans la danse… La jeune femme, jouée par Doria Tillier, a pour mission de faire revivre l’amour de jeunesse de Victor, alors que le sien avec Antoine dans la « vraie vie » montre des signaux de faiblesse. L’idylle renaît, mais quelle idylle ?

 

 

 

Victor, Margot et Antoine forment un trio amoureux où chaque interlocuteur s’intercale entre les autres. Margot face à Victor, Antoine dans l’oreillette de Margot. Dans cette danse viendra bientôt s’ajouter Marianne, perdue dans ses remords. Mais ce qui pourrait être un quatuor amoureux plat et sans aspérité se révèle être une petite trouvaille de répliques, de tensions et de réflexions sous l’œil de Nicolas Bedos. Les déceptions du récent Chambre 212 sont bien loin et on comprend toutes les raisons qui font du dernier film de Christophe Honoré un échec. Deux films à la structure et au récit proches, deux destinées différentes.

En reflet, le personnage d'Antoine joué par Guillaume Canet
En reflet, le personnage d'Antoine joué par Guillaume Canet

On ne peut que saluer également ce fragile équilibre maîtrisé de main de maître entre les différentes émotions crées de toutes pièces. Quand on sent poindre la larmichette au coin de l’œil, Bedos fait entrer le rire brusquement, efficacement, avec un dosage d’alchimiste. Les décalages sont parfaits et surprenants, on se laisse avoir et on en redemande. Jusqu’à la fin, La Belle Époque alterne les plans, les rires et les gorges nouées avec brio, et sans discontinuer.

 

 

À lui seul, Pierre Arditi, plus simplement « Pierre » dans le film, incarne une grande et belle question posée par le film. Quand est-ce que l’artiste arrête de l’être ? Son personnage, brillamment posé au second plan, est une belle palette, tout en justesse, au diapason du reste du film. Quand on vous dit que tout est bien mesuré !

 

 

On saluera enfin le léger clin d’œil (on l’imagine) du futur réalisateur du troisième volet des aventures d’OSS 117 et cette réplique sur une blanquette à la carte. « Elle est très bonne ». De quoi décrocher un sourire avant de nombreux autres, on l’espère (OSS 117 : Alerte rouge en Afrique noire est prévu en salles pour février 2021).

 

 

Ce nouveau film signé Nicolas Bedos parvient très vite à faire le pas de côté nécessaire pour éviter de ressembler à la pâle copie crainte du Truman Show. Bien que les références soient palpables, La Belle Époque change vite de trajectoire pour se diriger vers un propos plus englobant, peut-être plus massif où, des deux côtés de l’écran, la vérité est malléable. On voit les techniciens s’affairer sur le plateau, les trucages sont visibles, cet « hier » en carton-pâte est évident. Pourtant… Au fil du film, on se surprend aussi à vouloir rester dans ce café d’avant, avec ces clopes qui fument et ce quelque chose de disparu. La nostalgie a parfois du bon, ou alors n’est-ce seulement que son souvenir ?

 

 

 

Nicolas Bedos énerve, Nicolas Bedos agace et énerve encore. Mais voilà… Ça fait grincer des dents mais il faut le reconnaître : La Belle Époque est une petite rêverie sur le temps qui passe et les souvenirs qui nous tirent vers l’arrière. Au scénario, à la réalisation, aux dialogues et même à la composition de quatre morceaux de la B.O. (sur 21), Nicolas Bedos est omniprésent. À croire que ce sera désormais gage de plaisir dans les salles obscures…

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